La Journée SFSEP – JNLF, Bordeaux, Avril 2018
Avril 2018, Bordeaux accueille les JNLF sous un ciel pluvieux. La SFSEP organise sa matinée sous une éclaircie. Entre Garonne et Océan, vignes et Grand Opéra, Nicolas Collongues, Romain Marignier et Gilles Edan sont nos maîtres de chai ce matin.
Nicolas Collonges nous éclaire sur les maladies du spectre NMO
Si nous connaissons bien le spectre de la lumière, le spectre NMO s’élargit et se modifie au fil du temps. De l’observation clinique fin du XIX siècle par Sir Thomas Clifford et Eugène Devic, à la paillasse avec la découverte de l’aquaporine 4 (AQP4), les premiers critères voient le jour. En 2008 sous l’impulsion de la fondation Guthy Jackson, les recherches avancent vers des critères révisés de 2015 (Neurology. 2015 Jul 14;85(2):177-89) qui s’écrivent avec notre président Jérôme De Seze. Le spectre s’affine, d’une maladie optico médullaire à une aquaporinopathie et s’élargit au-delà de l’association œil et moelle grâce à l’immunologie et la radiologie. L’Area Post Rema entre dans le spectre et souvent oublié de nos radiologues. Le « Bright spotty lesion » est un phare au sein de la lésion médullaire et oriente vers le diagnostic. Si plus de 80% des maladies du spectre NMO sont AQP4 positifs, 20% reste séronégatifs pour les AQP4. Les NMO séro- positives sont plus « âgées » et plus « féminines » que la SEP. Mais que dire du risque d’handicap résiduel post poussée … C’est une maladie grave, les études avant le rituximab nous le prouvent.
Le temps manque pour cette fin de présentation malheureusement… Parmi les AQP4 négatifs, les « MOGOPATHIES » et les doubles séronégatifs complètent la famille du spectre NMO. Mais l’histoire pourrait rebondir avec la découverte d’un autre anticorps et faire disparaitre les doubles séronégatifs.
Qui, comment et combien de temps traiter les patients du spectre NMO ?
De focus en focus, de cas clinique en cas clinique, notre prescription s’écrit le long de la présentation du Docteur Romain Marignier.
Le traitement de fond doit être instauré tôt, la pathologie est sévèrement handicapante. Les rechutes à 1 an sont légion à plus de 60% et confortent l’idée de traiter après le premier épisode. Les traitements immunosuppresseurs ciblent le lymphocyte B. Si les poussées doivent survenir sous traitement de fond elles seront moins sévères (jeong et al). Sous traitement, la surveillance est essentiellement clinique mais ne peut se passer de la radiologie pour les lésions infracliniques. Dans l’avenir, des biomarqueurs comme les neurofilaments, les cytokines et le GFAP pourront guidés notre attitude thérapeutique. Le mofétil mofétil, l’azathioprine et le rituximab font partis de l’arsenal thérapeutique. Le rituximab est proposé en première ligne et en « rescue therapy ». La posologie est fréquemment de 1g à 15 jours d’intervalle avec une fréquence semestrielle. Eculizumab, Ofatumumab et le Tocilizumab sont à l’étude pour des deuxièmes lignes.
La poussée immédiate post cure rituximab, si elle surprend elle s’explique. Ce n’est pas le «french paradox» mais l’effet paradoxal rare de libération de B-Cell Activating Factor : BAFF. Le traitement des poussées passe par une corticothérapie. Les échanges plasmatiques (EP) seraient plus efficaces après une corticothérapie. Lors des poussées de myélite, les EP pourraient être privilégiés. Il existe « une fenêtre de tir » courte de 21 jours pour que le EP soient plus efficaces.
Si la clinique et la physiopathologie des NMO séronégatives AQP4 est différente, le traitement est identique. Les NMO anti MOG semblent moins sévères. Nous ne connaissons pas encore le rôle pathogène des anti MOG. L’arrêt du traitement pose question. Il est déraisonnable de stopper dans les formes séropositives. A 5 ans, nous pouvons en discuter pour les formes AQP4 négatives, et anti MOG.
Télécharger la présentation de Romain Marignier
Le Professeur Gilles EDAN, nous propose une nouvelle classification des phénotypes de SEP pour améliorer nos pratiques et adapter nos traitements
Des quatre phénotypes appris depuis de nombreuses décennies, maintenant nos patients vont se décliner en actif ou non actif. L’IRM image l’activité de la maladie. Après 6 mois d’un traitement instauré, l’IRM est conseillée. La maladie est alors active ou pas. Un suivi annuel radiologique est nécessaire au même titre que la clinique. L’injection de produit de contraste peut être épargnée si les examens sont comparables d’une année à l’autre. Cela nécessite un même protocole à appliquer dans nos centres radiologiques.
Dans les formes progressives, en 1996 on parlait de SEP primaire ou secondairement progressive. Maintenant, on distingue la forme progressive active ou non active avec ou sans progression
En 2018, nous devrions baser notre raisonnement sur ces questions :
Est-ce une forme progressive ? | -> OUI | Est-ce une forme active ? | -> Oui |
-> Non | |||
-> NON | Est-ce une forme active ? | -> Oui | |
-> Non |
Notre vocabulaire doit se modifier, et parler la même langue. Lublin, vient même à bannir le terme de « progressing » au profit de « worsenning ». Il n’y a plus de « forme bénigne ou maligne ». Pour preuve, 50% à 10 ans des formes dites bénigne s’aggravent. Et à l’inverse, des formes agressives dite maligne peuvent ne plus l’être à moyen terme. Pour préciser les phénotypes, l’immunologie avec les neurofilaments pourraient s’avérer nécessaire.
La matinée se conclue par une Controverse : Les traitements de fond modifient-il le passage en forme Secondairement Progressive ?
La joute verbale est un art. Dans ce prétoire, l’avocat de la partie civile, Jérôme De Seze va argumenter le « oui ». L’avocat de la défense, Pierre Labauge va défendre « le non ».
Jean-Christophe Ouallet, le juge va essayer de réunir les plaidoiries de chacun. Ces dernières seront publiées sur le site prochainement.
Nous irons directement aux conclusions. « Le traitement change forcément l’histoire naturelle de la maladie et donc le passage en forme progressive. Mais il n’est pas le seul responsable, la maladie a intrinsèquement changé. Au vue des études récentes, et en particulier l’analyse des populations sous placebo, nous observons une diminution de fréquence des poussées ainsi que de la vitesse d’aggravation. L’âge de passage en forme SP recule »
Remise du Prix Etienne Roulet
La matinée se conclue par la remise du prix Etienne Roulet. Avec son travail sur « les lymphocytes T folliculaires régulateurs comme biomarqueurs de réponse au rituximab dans la NMO », Philippe Nicolas reçoit le chèque de la main de notre président.